FRANCOIS HOLLANDE

Article Le Monde.fr du 28 avril

"Au meeting de François Hollande : “Entre DSK et lui, je le choisis sans hésiter"

 
A Clichy-la-Garenne, ville à gauche "depuis plus d'un siècle", comme le rappelle son maire, Gilles Catoire, ils sont venus en nombre, mercredi 27 avril, écouter François Hollande. Candidat à la primaire socialiste, l'ancien premier secrétaire du Parti socialiste sillonne la France depuis près d'un an. Mais à deux mois de l'ouverture de la campagne officielle, il a décidé d'accélérer, et prononce ce soir-là son premier "grand discours".

"AVANT, JE L'AIMAIS BIEN, AUJOURD'HUI, JE L'ÉCOUTE"

Les supporteurs de François Hollande arrivent parfois de loin, comme Rémy, fonctionnaire de 26 ans, venu de Toulouse. Il suit l'ex-premier secrétaire depuis 2009. Il apprécie la priorité donnée à la jeunesse dans le programme de M. Hollande, son "sérieux" également. "Il a perdu du poids, mais il a pris de l'épaisseur, changé d'attitude. Avant, je l'aimais bien, aujourd'hui, je l'écoute, assure-t-il. "C'est quelqu'un qui connaît la gauche. Il est habitué à rassembler, à créer l'unité, il saura travailler avec nos partenaires." Surtout, il loue la "détermination" de l'ancien patron du PS, "qui ira jusqu'au bout". Une qualité dont il juge Dominique Strauss-Kahn dépourvu. Si son champion ne triomphait pas, il lui préférerait Martine Aubry, "sur le terrain depuis 2007".

Evidemment, les militants PS de la ville sont présents. Thiru, maître d'hôtel de 53 ans, est inscrit "au PS depuis vingt ans". "Hollande est intéressant, mais pour l'instant, je vais écouter tout le monde", explique-t-il. Ce qu'il souhaite avant tout, c'est "un changement politique". Et il l'admet : son choix se fera "en fonction des sondages". Le mieux à même de battre Nicolas Sarkozy aura sa voix.

"IL PREND DES SUJETS QUI MARCHENT BIEN"

La majorité du public n'est cependant pas composée de militants mais de sympathisants. Voire de simples curieux. C'est le cas de Pape, un téléconseiller quadragénaire, venu en voisin. Plutôt de gauche, sans avoir jamais milité, il habite Clichy, à deux rues du théâtre où a lieu la réunion publique. "Je viens par intérêt pour Hollande, il a l'air sincère et il parle vrai, ça a l'air d'être quelqu'un de bien", confie-t-il. Comme la plupart, il connaît mal son programme et ses idées. Votera-t-il pour lui aux primaires ? "Ah bon, je peux voter ? Comment on fait ?" On lui explique, il répond qu'il votera "peut-être". Pour Hollande. Ou l'un des autres, s'ils viennent à Clichy eux aussi.

Mig, la cinquantaine, est également là pour écouter plutôt que pour soutenir François Hollande. "Pourquoi pas lui ?" Elle estime que l'ex-premier secrétaire "fait partie de ceux qui peuvent briguer le poste" de chef de l'Etat, et surtout faire gagner la gauche. Elle n'attend de toute façon plus grand chose des politiques. "Je ne crois pas qu'on puisse tout changer d'un jour à l'autre, les marges de manœuvre sont devenues trop étroites."

Si les applaudissements de la salle restent contenus à l'arrivée de M. Hollande, l'assistance écoute attentivement son discours de qaurante-cinq minutes sur le "rêve français", qu'il termine sous les vivats. A la sortie, alors que quelques "François président !" retentissent, chacun y va aussi de son commentaire. Michèle, "affectivement militante", mais pas encartée, juge, en vraie professionnelle de la communication politique : "J'ai aimé l'humour, le regard, la réserve. Je l'ai trouvé bon." Et ses idées, la priorité donnée à la jeunesse ? "Il prend des sujets qui marchent, il surfe bien. Mais j'hésite avec Strauss-Kahn, il est plus fédérateur, je pense." Pour elle aussi, une seule chose compte : "Battre Sarkozy."

"IL EST RESTÉ DANS LES CLASSIQUES DU PS"

Stéphane, Michel et Jean-Philippe, la cinquantaine, posent également un jugement plus lucide que passionné. Tous trois militants du Mouvement républicain et citoyen, le MRC de Jean-Pierre Chevènement, ils ont jugé le discours "un peu lénifiant, avec des moments très mélo". Mais ils apprécient qu'il ait fait "beaucoup de propositions, qu'on peut discuter". S'ils regrettent qu'il se montre "léger sur sa critique de l'Europe", ils ont beaucoup apprécié son passage sur la jeunesse. Bref, Hollande ne leur déplaît pas. Surtout pour une raison : "Avec lui, les partisans de Strauss-Kahn peuvent effectivement s'inquiéter."

On croise aussi un public plus surprenant. Deux hommes discutent vivement de la prestation. L'un, Jean-Michel, est militant socialiste, et soutient Arnaud Montebourg. S'il souligne le "clivage sur la mondialisation" entre son favori, qui prône un protectionnisme européen, et M. Hollande, il a globalement apprécié le discours. Lui aussi l'assure : "Entre DSK et lui, je le choisis sans hésiter."

Trista son interlocuteur, est également militant... mais à l'UMP. En rupture avec son parti – "Nicolas Sarkozy a fait des choses bien, mais je déteste le personnage" –, il respecte François Hollande pour "son écoute, son recul. J'estimais que c'était son heure, qu'il méritait sa chance, mais je suis déçu par son discours. Je pensais qu'il arriverait avec des idées nouvelles, mais il est resté dans les classiques du PS. Ce n'était pas mauvais, mais c'était basique"."

Samuel Laurent